Alors que plus de 30 % des salariés français télétravaillent désormais régulièrement, contre 5 % à peine avant la pandémie, le travail à distance exacerbe certains travers de la vie de bureau, comme le sur engagement et les inégalités hommes-femmes.
En effet,
Travailler de chez soi fait gagner du temps. 62 minutes en moyenne par jour en France, principalement en économisant sur les trajets domicile-bureau.
Le hic?
Les télétravailleurs réinvestissent 44 % de ce temps … dans leur travail !
Seulement un tiers du reste du temps est consacré aux loisirs et notamment au sport.
Et 11 % aux autres.
Une tendance qui n’est pas sans impact sur la santé.
Comme le montrent les baromètres du cabinet Empreinte humaine, les télétravailleurs sont ainsi plus sujets au burn-out que les salariés en général. Ils sont aussi un sur deux à estimer que la solidarité disparaît avec le télétravail, et la même proportion constate que ses collègues sont plus individualistes.
Trois ans après le début de la pandémie de Covid, qui a durablement développé la pratique du travail à distance, le Haut Conseil à l’Égalité a de son côté dressé, en février dernier, un bilan mitigé du télétravail à l’aune du genre.
Ce rapport montre que les femmes sont moins nombreuses que les hommes à avoir repris à plein temps en présentiel, ce qui présente plusieurs risques, dont une « réduction des opportunités de carrière », avec une déconnexion des réseaux professionnels, et un maintien des « différences de salaire ».
Selon la sociologue Gabrielle Schütz, les femmes sont en effet « plus demandeuses de télétravail que les hommes », pour plusieurs raisons, « d’ordre structurel’.
Elles ont « moins de marge de manœuvre dans la sphèrefamiliale » (plus de tâches ménagères à faire), mais aussi dans la sphère professionnelle (leurs emplois, moins hauts placés, sont moins flexibles en présentiel).
En télétravail, la productivité a également plus de chance d’être « invisibilisée », d’autant, insiste le HCE, que « la représentation du télétravail des femmes et en particulier des mères est perçue plus négativement que celui des hommes ».
Même constat dans le livre A distance. La révolution du télétravail(PUF) qui consacre un chapitre à ce sujet, sous le titre : « Femmes, acrobates du quotidien ».
On y apprend ainsi que ces dernières consacrent le temps gagné sur les transports grâce au télétravail, à la sphère familiale et aux tâches domestiques, alors que les hommes ont tendance à pratiquer un sport ou travailler davantage.
Pourtant, les avantages du télétravail sont nombreux.
Selon une étude de la Fondation Jean Jaurès sur les représentations associées au télétravail en Europe, les plus fréquemment cités sont l’autonomie, une meilleure gestion de la pression au travail, une meilleure conciliation vie pro -vie perso, une efficacité accrue et un plus grand épanouissement.
Une autre étude, de Gartner cette fois, montrait récemment que les télétravailleurs autonomes dans l’organisation de leur journée avaient deux fois plus de chances de rester dans leur entreprise que ceux qui ne peuvent pas décider de leurs horaires
Un argument de poids en ces temps de pénurie de personnel.
Encore faut-il aider ces télétravailleurs -et télétravailleuses -à tirer le meilleur du travail à distance sans reproduire, voire exacerber, les travers, les inégalités et les (mauvaises) habitudes de la vie de bureau.